Etats des lieux
Larissa Fassler au Musée d’Orsay
17 décembre 2025 - 22 mars 2026
Lorsque la gare et l’Hôtel d’Orsay ont été transformés en musée en 1986, le bâtiment avait été conçu pour accueillir 1,5 million de visiteurs par an. Aujourd’hui, plus de quatre millions de personnes le visitent chaque année. Afin d’améliorer l’expérience des visiteurs et de répondre à cette fréquentation croissante, le musée a entrepris d’importants travaux de rénovation. Alors que cette transformation architecturale s’amorce, le Musée d’Orsay a invité l’artiste Larissa Fassler à observer et à réagir à ce processus.
Fassler, dont la pratique consiste à cartographier empiriquement l’espace public, a passé trois mois en 2023 à mener des recherches sur place au musée. Pendant cette période, le Musée d’Orsay est devenu à la fois son atelier et son sujet. Elle s’y est rendue quotidiennement et a utilisé son propre corps comme outil pour mesurer et cartographier son architecture, parcourant les pourtours de l’entrée, de la nef, des galeries, des escaliers, des couloirs et des ascenseurs. Chaque espace est devenu une trace dessinée à la main de la manière dont les visiteurs circulent, de la façon dont les corps sont orientés et des endroits où ils sont amenés à attendre.
À travers ces dessins, elle a tracé le mouvement des visiteurs. Un point bleu marque une pause. Une ligne brisée suit un parcours. Lorsque la tension traverse l’espace, la ligne devient rouge. Lorsqu’un corps est bloqué, frustré, déplacé ou poussé hors de son rythme, cela est noté. En parallèle, elle a relevé des fragments de conversations entendues, des gestes, des vêtements, des signes d’inconfort, de l’immobilité, ainsi que l’autorité discrète de la signalisation et des flèches du musée.
Sous-jacente à ce travail se trouve la fascination du XIXe siècle pour le corps féminin, non seulement comme sujet mais aussi comme surface, lieu, ornement et spectacle. Fassler porte une attention particulière aux économies du regard : le regard collectif de la foule, le regard autoritaire du peintre, le regard consommateur de l’utilisateur d’Instagram, et le regard souvent réduit au silence de la personne représentée.
Dans la nef centrale, une confrontation silencieuse se dessine. D’un côté, l’Académisme : des corps idéalisés, mythifiés, perfectionnés, arrangés pour le plaisir dans des tonalités chaleureuses de complaisance et de passivité érotique. De l’autre, le Réalisme : politique, résistant, brut, la palette virant vers des ombres livides.
Un visage ne détourne pas le regard. Elle soutient le nôtre. Elle refuse de disparaître.
Plus d’informations larissafassler.com


